Depuis le début de l'Holocène, le climat africain a connu de larges changements paleoclimatiques et paleoenvironementaux. Partant d'un climat globalement humide au début de l'Holocène aussi connu sous le terme de période humide africaine (African Humid Period, AHP), le climat est devenu globalement plus sec depuis la fin de cette période vers 6 à 4 ka. Ce climat récent plus sec n'est pas favorable au dépôt et à la préservation des sédiments menant à des enregistrements rares et souvent discontinus compliquant les interprétations paléoclimatiques et paléoenvironementales basées sur ces archives. Cette étude porte sur une carotte de tourbe continue et homogène provenant de la tourbière de NGaoundaba (Nord-Est du Cameroun) et couvrant les derniers 10 000 ans via l'utilisation d'un large panel de biomarqueurs lipidiques avec des origines biologiques variées : tétraéthers de glycerol isoprénoides et ramifié microbiens (isoGDGTs et brGDGT respectivement), n-alcanes et produits de dégradation de plantes, hopanoides bactériens, ... En utilisant des variations dans l'abondance, la concentration, la composition isotopique ou des calibrations empiriques récentes développées pour la tourbe, nous reconstruisons des changements de végétation, précipitations, température ou cycle du méthane pour mieux comprendre le timing et les spécificités de la période humide africaine à la fois localement et régionalement en comparant à d'autres enregistrements disponibles.
Un assemblage varié de biomarqueurs lipidiques a été détecté dont des n-alcanes du C19 au C37, des hopanes et hopènes du C27 au C31, des GDGTs (iso- et brGDGTs). De 10 à 6 ka, les températures basées sur les GDGTs et le δDC31 n-alc indiquent une période plus chaude et humide que la période actuelle coïncidant avec la période humide africaine. De 8,9 à 7,9 ka, les valeurs appauvries en δDC23 n-alc et l'abondance de biomarqueurs généralement associés à des lacs d'eau douce et à la matière organique microbienne suggèrent une période de développement de la tourbière avec une production in-situ accrue. L'abondance des n-alcanes et le δ13Cn-alc indiquent une plus grande proportion de plante de type C3 entre 8 et 6ka durant la période humide africaine comparativement à la fin de l'Holocène où le δ13Cn-alc indique une prédominance des plantes en C4.